Le secteur de la construction demeure une activité essentiellement masculine. En Wallonie, les femmes qui y travaillent représentent moins d'un pour cent de la main d'oeuvre. Pour inciter les femmes à se tourner vers ce secteur en pénurie, Embuild Wallonie, anciennement confédération de la construction wallonne, lance avec plusieurs partenaires une campagne de sensibilisation.
Éléonore est ouvrière dans la construction en Wallonie. Elles ne sont que 363 dans ce secteur qui compte plus de 45 000 travailleurs. Ce matin, elle tenait à témoigner lors de la présentation d'une campagne de sensibilisation pour attirer les femmes dans la construction. Éléonore est carreleuse. Doit-elle aujourd'hui faire face à des remarques lorsqu'elle annonce sa profession ?
Il y a toujours un peu d'étonnement, mais ça s'arrête là. Il n'y a pas spécialement de moqueries ou de remarques désagréables.
Dans le cadre d'une campagne de sensibilisation, 65 entreprises afficheront sur leur logo "...& filles". Le message est clair : la construction, ce n'est pas que pour les garçons. Hugues Kempeneers, directeur général d'Embuild Wallonie, anciennement la Confédération de la construction wallonne :
L'objectif de la campagne, c'est de donner un coup de projecteur sur le secteur de la construction afin de montrer qu'on a besoin de main d'œuvre. Et si la main d'œuvre est féminine, c'est encore mieux puisque aujourd'hui dans notre secteur, on a 0,8% de femmes seulement chez les ouvriers. 45 000 ouvriers et seulement 363 femmes. Donc on a un vrai besoin de féminisation du secteur.
Des freins encore nombreux
Alors, comment expliquer cette faible féminisation du métier ? Les freins sont encore nombreux, tant du côté de la gent féminine que des employeurs, selon Aurélie Notebaert, collaboratrice sectorielle construction à la CG-FGTB :
Il y a des freins au niveau des femmes, je pense, parce qu'elles n'ont peut-être pas d'exemple à suivre. Ou bien parce qu'elles ne se posent pas la question : "Est-ce que je pourrais travailler dans le secteur ?" Du côté des entreprises, elles ont aussi peut-être peur qu'une femme risque de déstabiliser une équipe ? Il y a également les stéréotypes de pouvoir porter des charges lourdes. Il y a pourtant des métiers où les femmes sont présentes et où elles doivent porter des charges lourdes. Exemple dans les soins de santé où l'on doit porter des patients de 80 kilos.
Hugues Kempeneers souligne de son côté que travailler dans la construction est moins difficile qu'il y a 30 ans par exemple:
L'innovation est très présente dans le secteur de la construction. Je vais prendre un exemple. Les exosquelettes aujourd'hui, c'est une réalité sur le chantier. Un peintre ou une peintre qui doit peindre un plafond pendant toute la journée avec l'aide d'un exosquelette, c'est beaucoup plus simple que lorsqu'on doit porter des charges assez lourdes. Un exosquelette vient soulager le corps. Preuve que l'innovation est très présente. Elle peut aider à diversifier les profils intéressés à travailler dans notre secteur.
Pour œuvrer à la féminisation du secteur, des organismes de la construction recourent à des conseillères mixité. Ambre Rivière-Bourhis, Conseillère en genre chez Constructiv:
Notre mission est d'investiguer un peu plus sur ce qui se passe au niveau des femmes. Les freins et les leviers qu'elles peuvent rencontrer lorsqu'elles cherchent à intégrer le secteur. Donc à tout niveau, que ce soit formation, intégration dans les entreprises et pérennisation. Je m'intéresse aussi aux besoins des entreprises et aux outils nécessaires pour accueillir les femmes au mieux.
Une campagne de sensibilisation d'une semaine, c'est bien, mais cela ne suffira pas pour changer les choses. Changer les mentalités, cela prend du temps. Et ça, c'est aussi tout un travail au niveau de l'éducation.