Le quotidien "L'Avenir Namur" a publié, il y a quelques jours, un article sur la future implantation d'un hôtel du groupe hollandais Van der Valk dans le nouveau parc d'activités économiques Care-Ys de Bouge. Problème majeur, le BEP n'a toujours pas donné son accord vert pour la vente du terrain. Au centre des discussions, le Décret wallon sur les parcs d'activités économiques.
Ce n'est pas nouveau, le groupe néerlandais Van der Valk souhaite s'implanter en région namuroise. La cible choisie : le nouveau parc d'activités économiques du BEP, nommé Care-Ys, qui accueillera des entreprises autour de la thématique santé à Bouge. Le projet hôtelier a déjà fait l'objet de discussions au niveau urbanistique, notamment sur le nombre de chambres. Mais alors que l'enquête publique est ouverte, le BEP tient à préciser un "détail" important : il n'a pas (encore) donné son accord pour la vente du terrain. En cause, une incertitude juridique autour du dossier, liée au Décret wallon du 2 février 2017 relatif au développement des parcs d'activités économiques (PAE).
Deux conditions qui posent problème
Ce décret impose, notamment, deux conditions aux établissements Horeca qui veulent s'installer dans un PAE. D'une part, que les activités de cet établissement présentent un lien de fonctionnalité, de proximité et de dépendance économique avec les activités du PAE. D'autre part, ces établissements Horeca doivent répondre à un besoin non-rencontré dans un rayon d'un kilomètre autour du PAE.
Un texte qui impose des éclaircissements, selon le BEP, qui a donc interpellé à plusieurs reprises l'administration et le cabinet du Ministre en charge de ce dossier. "Des précisions nécessaires pour permettre au BEP d'instruire le dossier préalable à la vente du terrain", précise le Conseil d'administration du BEP, dans un communiqué.
Et ces éléments ont été communiqués au BEP. Du moins, partiellement. Le cabinet du Ministre Willy Borsus précise que "la notion de dépendance implique que, sans les entreprises situées dans le périmètre du parc, l'activité du complexe hôtelier ne soit pas viable". Mais d'ajouter que le Décret "n'exige pas expressément de dépendance économique exclusive". À charge de l'administration de démontrer le lien de dépendance économique de l'hôtel avec les besoins des entreprises sur le site.
Le projet déposé par Van der Valk est colossal. Plus de 4.500 mètres carrés, 178 chambres, une brasserie pouvant accueillir 760 personnes, un centre de congrès de plus de 1.800 places, un espace wellness avec piscine et hammam, etc. Le tout réparti sur 6 étages. La question est épineuse pour le BEP : le projet est-il dimensionné pour les entreprises du parc (d'où la notion de dépendance économique) ou est-il dimensionné pour rayonner majoritairement bien au-delà du périmètre du PAE ?
Quant à la condition d'un besoin non-rencontré dans une zone de moins de 10 kilomètres, le BEP demande qu'elle soit précisée dans le Décret. Faut-il considérer l'activité comme un tout (soit ne pas scinder l'hôtel du restaurant, du centre de congrès et de l'espace wellness) ou faut-il considérer chaque activité indépendamment ? Dans ce dernier cas, il existe une concurrence, notamment en restauration, a proximité immédiate du site.
Des sanctions pour le BEP en cas de non-respect du Décret
Si le BEP est aussi pointilleux, c'est qu'il y a de l'argent en jeu. Le Décret ne prévoit pas de mécanisme d'autorisation en amont mais un contrôle du respect des conditions en aval. Mais en cas de non-conformité, le mal est fait et le BEP s'expose à des sanctions financières lourdes, comme, par exemple, le remboursement des subsides perçus pour la création de Care-Ys. Car, faut-il le rappeler, l'aménagement des voiries, l'égouttage ou encore l'éclairage font l'objet de subsides wallons. Des deniers publics qui doivent servir, avant tout, le projet des entreprises installées dans ce parc dédié à la santé.
Vu cette insécurité juridique, le BEP gèle donc la vente du terrain à Van der Valk, sine die. Du moins, tant que l'Administration ou le Ministre compétent n'auront pas pris une position plus claire sur le Décret. Une position qui ne risque pas de tomber d'ici aux élections (notamment wallonnes) de juin prochain. Le groupe hollandais devra donc attendre avant de pouvoir signer les actes de vente.
Permis d'urbanisme introduit... sans titre de propriété
Petite subtilité de la législation en matière d'urbanisme en Wallonie, il est tout à fait possible, pour une entreprise, d'introduire une demande de permis d'urbanisme sans être propriétaire du terrain. C'est d'ailleurs régulièrement le cas, le permis suivant son cours en parallèle des discussions quant à l'acquisition du terrain, histoire de gagner un maximum de temps. Sauf qu'ici, le groupe hollandais risque bien de se retrouver avec un permis, mais sans pouvoir procéder au moindre coup de pelle. Pas certain, d'ailleurs, que la situation s'éclaircisse rapidement avec le nouveau Gouvernement wallon, a fortiori si le Décret doit être modifié.
Le dossier de demande du permis d'urbanisme est actuellement au stade de l'enquête publique, il est consultable jusqu'au 3 mai 2024 à la Cellule Permis d'environnement de la Ville de Namur, ouverte sur rendez-vous du lundi au jeudi, de 8h à 12h (Hôtel de Ville). Une version électronique est, par ailleurs, consultable sur le site de la Ville de Namur.